Une succession d’édifices

L'église de Jouy-le-Moutier est la plus ancienne et la plus grande parmi les quatre églises que compte le groupement paroissial de l'Hautil. Classée monument historique par arrêté du 11 décembre 1912, elle est le fruit d’une succession d’édifices bâtis et emboîtés depuis l’An Mil jusqu’au XVIe siècle. Elle est un témoin composite de l’évolution architecturale des églises chrétiennes d’Occident.

Depuis le XIXe siècle, de nombreux travaux de restauration ont été entrepris, particulièrement dans les vingt dernières années du XXe siècle. En 1993-94, l'installation d'un chauffage par le sol a permis de dégager les traces d’une stèle funéraire et d'un premier édifice caractéristiques du Haut Moyen Âge, ainsi que les fondations d’un bâtiment de style roman datant du milieu du XIe siècle.

Mais c’est au XIIIe siècle que le monument acquiert son plan actuel ainsi qu’un choeur de facture gothique, qui répond alors à l’influence stylistique de la cathédrale Notre-Dame de Paris. (Le Chapitre de Notre-Dame de Paris avait alors le patronage de la paroisse).

Au XVIe siècle, la nef centrale est reconstruite, les bas-côtés du XIIe siècle sont rehaussés, et le porche d'entrée nord est édifié, témoignant de la transition entre le gothique flamboyant et la Renaissance. L’imposante toiture de celui-ci, suppr imée au XIXe siècle, a d’ailleurs été rétablie en 1979.
 

Un clocher emblématique

Partie la plus ancienne de l'église actuelle, son clocher roman du second quart du XIIe siècle, coiffé d'une flèche en pierre (qui sera restaurée en 1928), est typique du Vexin français. Salué pour ses proportions harmonieuses et son ornementation habile, il est comparable à cinq autres clochers romans à deux étages que sont ceux de Cergy, Courcelles-sur-Viosne, Ennery, Nesles-la-Vallée ou Santeuil.

Traits d’union entre la terre et le ciel, les clochers ont marqué le paysage du Vexin français. Chaque clocher est une oeuvre unique qui rappelle l’identité du village et correspond aux besoins et aux moyens de chaque époque. Selon l’usage vexinois, le clocher s’élève sur l’emplacement des premières constructions et a été maintenu tel quel lors des remaniements ultérieurs.

L’heureux concours de bienfaitrices

Ode de Meulan au XIe siècle, Hildeburge de Gallardon ou encore Agnès de Montfort au XIIe siècle, eurent en commun de contribuer à l’évolution de l’édifice grâce à leurs dons. Cette dernière, épouse d’un comte de Meulan, fit le voeu de consacrer une partie de ses biens à l’église si son époux revenait sain et sauf de la croisade. Son voeu exaucé, on dota le monument d’un nouveau clocher. Sa générosité s’étendit à dix-sept paroisses alentours qui verront leur église dotée d’un clocher de même facture dit « de la série du voeu d’Agnès de Montfort ».

Un triple patronage

Longtemps connue comme l’église Notre-Dame de la Visitation, ce titre a été abandonné par la paroisse qui a placé l'église sous le triple vocable de la Nativité de la Sainte-Vierge, de Saint-Leu ou Saint-Loup, archevêque de Sens (vers 573-623), et de Saint-Gilles l’Ermite (640-720). Un vitrail classé aux Monuments Historiques évoque les saints protecteurs, tandis qu’une chapelle de l’église était dédiée à Saint-Gilles (subsiste sa statue dans la niche au-dessus de l'entrée de la sacristie).

Un mobilier remarquable

L'église renferme plusieurs éléments du mobilier classés aux Monuments Historiques au titre objet. Ainsi l’on peut admirer des fonts baptismaux datant du XIIIe siècle, ou encore une statue en bois de Saint-Gilles-l'Ermite, datant du XVIIe siècle. Une statue de la Vierge allaitant l'Enfant, et datant du XIVe siècle, fut restaurée en 2005 après avoir connu bien des vicissitudes. Tout comme une sculpture de la Vierge à l'Enfant et à l'oiseau qui, longtemps placée sous le porche, a rudement souffert des intempéries et de la pollution : la tête de l'enfant et la tête de l'oiseau sont manquantes.

Enfin, l’on pourra observer un tableau ex-voto peint à l'huile sur toile, représentant Sainte-Thérèse d'Avila sur un nuage, intercédant pour la naissance du Dauphin, et en bas à gauche, Anne d'Autriche vouant le jeune Louis XIV à la Vierge.


Source : Evelyne Demory-Dupré, Jouy-le-Moutier, Un patrimoine au fil du temps, éditions du Valhermeil, 2004.